En cette semaine de la mobilité, je voudrais revenir sur la question des 4 nouveaux parkings que la majorité PS/Spa/MR/VLD souhaite créer dans le cœur de Bruxelles. Selon les documents du Collège de la Ville, il s’agirait de construire 4 nouveaux parking, d’environ 400 places chacun, pour un total de 1600 places (Conférence de Presse de l’échevine de la mobilité 7/11/2014).
Rappelons d’abord que dans le centre de la Ville on trouve déjà 15.700 places de parking dans les 34 parkings publics localisés en différents lieux du Pentagone. Leur taux d’occupation moyen est de 60%, c’est-à-dire que les parkings sont sous-utilisés. Ces informations se trouvent dans l’étude du bureau Transitec, réalisée pour la Ville pour son Plan Communal de Mobilité en 2010. Le Collège de la Ville, Mayeur et Ampe, ne contestent pas vraiment ces données, mais considèrent qu’il faut augmenter l’offre.
Leurs arguments sont principalement au nombre de 4 :
Le premier est de dire que des nouveaux visiteurs doivent pouvoir venir en voiture pour accéder aux commerces et participer à la revitalisation du centre qui sera générée par la mise en œuvre du piétonnier.
Le deuxième est d’indiquer que lors des quelques WE de soldes ou de « Plaisirs d’hiver » les parkings du centre sont saturés.
Le troisième est celui de la compensation des places de parking qui seront supprimées en voirie ; leur nombre n’est pas communiqué, mais selon les déclarations, de 450 à 600 places disparaîtraient sur le piétonnier et les rues adjacentes. Il est précisé que les places sous lesquelles ont construirait les 4 nouveaux parkings verraient la suppression du parking en surface. Le Collège ne communique pas non plus sur le nombre de places de parking qui seraient ainsi supprimées.
Le quatrième argument invoqué est celui de la gratuité : les parkings, ainsi que le réaménagement de surface ne coûteraient « rien au pouvoir public » (argument connu cfr le nouveau stade national) et une tarification favorable serait exigé pour un certain nombre de places destinées aux riverains.
Revenons sur chacun de ces arguments.
1. Des nouveaux visiteurs doivent pouvoir venir en voiture pour accéder aux commerces et participer à la revitalisation du centre qui sera générée par la mise en œuvre du piétonnier.
Le centre ville a pour vocation d’attirer des visiteurs, qu’ils viennent des quartiers aisés d’Uccle ou d’ailleurs, le centre de Bruxelles a une vocation d’attractivité régionale et nationale. Cette attractivité est un atout et sans tomber dans la caricature, les activités du centre, culturelles, commerciales et horeca doivent pouvoir attirer des populations « riches ». Le centre doit aussi être ouvert à des publics dont le pouvoir d’achat est faible, « la valeur d’usage » de la Ville, celle qui échappe à la marchandisation fait partie même de ce qui « fait ville ».
Donc oui à ce que des visiteurs acheteurs venant d’Uccle, des Woluwés etc viennent à Bruxelles.Faut-il pour autant des nouveaux parkings ? Ma réponse est non et d’abord parce que ces parkings existent et sont à « moitié vides » !
Le discours même de Ampe et de Mayeur risque d’effrayer les visiteurs. En effet à les entendre il n’y aurait pas moyen de venir et de se garer au centre de Bruxelles. La signalétique en vigueur sur la Petite Ceinture étant particulièrement pauvre en information, le seul message qui ressort est que le centre n’est pas accessible.
Que faire alors ?
Inciter chaque bruxellois à venir au centre pour des activités diverses, de la promenade découverte à la culture, en passant par l’horeca et le commerce. Renforcer l’accessibilité du centre en transport public (la prolongation des lignes de bus pour relier les quartiers du Pentagone, l’amélioration des fréquences en journée, le soir et le WE), informer sur ce qui existe (Stib, De lijn, TEC, Noctis, SNCB). Baliser les quartiers. Comment les visiteurs peuvent-il se retrouver s’il n’y a pas une signalisation qui indique comment arriver à Dansaert, Sainte-Catherine, Saint-Jacques, les Marolles etc. Installer les indications pour les piétons, à la sortie des gares et pour les automobilistes dès la petite ceinture, avec la signalisation des parkings existants comme promis. La Région bruxelloise est inerte depuis presque 1 an et l’adoption par le Collège de la Ville de Bruxelles de son plan parking. Elle a ici l’occasion de montrer qu’elle a une capacité d’intégrer ce plan dans une politique régionale que beaucoup attendent…
2. Le deuxième argument du Collège est que lors de quelques WE de soldes ou de « Plaisirs d’hiver » les parkings du centre sont saturés.
Que faire ?
Construire des infrastructures pour des moments de « pics » n’est pas courant. Pourquoi ne pas examiner des pistes qui puissent répondre au problème plutôt que d’augmenter encore l’offre de parkings publics ? De toutes manières, à ces moments-là, les voiries de la Ville sont complètement saturées et les embouteillages pénalisent tout le monde : nuisances pour les riverains, heures perdues pour les bus pris dans le trafic et pour les automobilistes. La solution raisonnable pour ces événements est de choisir une alternative. Pourquoi ne pas accentuer l’accès combiné voitures-STIB avec un tarif attractif ? Le parking Arts-Loi représente 1150 places de parking (à mettre en lien avec les 1600 que la Ville veut construire), qui sont en lien direct avec les stations De Brouckère et Sainte-Catherine), ce parking est fermé le WE et le soir. Idem pour la rue de Stalle ou le Heysel ou même Delta. Faciliter la circulation des bus durant ces périodes encouragerait les utilisateurs potentiels.
3. La compensation des places de parking qui seront supprimées en voirie ; leur nombre n’est pas communiqué, mais selon les déclarations, de 450 à 600 places disparaîtraient sur le piétonnier et les rues adjacentes. Il est précisé que les places sous lesquelles ont construirait les 4 nouveaux parkings verraient la suppression du parking en surface.
Le collège de la Ville de Bruxelles espère boucler la construction des parkings avant les élections communales d’octobre 2018. Des contacts ont été pris par l’échevine de la mobilité avec les responsables du secteur du parking pour « sentir » la disponibilité du secteur, qui semble favorable. Pourtant les chiffres disponibles, montrent plutôt un taux d’occupation loin de 100%. Dernièrement Interparking a annoncée une diminution de 20% de l’utilisation de ses parkings en lien avec l’entrée en vigueur du plan de circulation.
Donc pour compenser 600 places de parking + un nombre indéterminé, le Collège propose la construction de 1600 places. Si l’objectif est de compenser les places de stationnement perdues en surface pour les riverains, le collège pourrait commencer par rendre publics ses chiffres. D’autre part, si l’objectif est d’améliorer la qualité de l’environnement dans le centre et de réduire la pression de la circulation, il est certain qu’il ne faut pas offrir des nouvelles places de parking ? N’y a t-il pas d’autres solutions qui n’hypothèquent pas des développements futurs de la zone piétonne?
Que faire ?
Pour les parkings publics existants et sous-occupés je propose qu’on les signale mieux, la Région a promis d’installer du « télejalonnement » sur la petite ceinture, ces panneaux qui indiquent la direction à prendre et le nombre de places disponibles dans chaque parking. Force est de constater que le Ministre de la mobilité régionale n’a donnée aucune date pour la mise en place de ce système, pourtant essentiel et dont on parle depuis longtemps.
La tarification des parkings est également trop élevée, la Ville a un droit de regard sur ces tarifs lorsqu’il s’agit de concessions, elle ne l’exerce pas. Elle pourrait aussi inviter les entreprises de parking à s’inscrire positivement dans une démarche de meilleure utilisation des places existantes. Une tarification non pas à l’heure entamée, mais au temps d’occupation réel, irait dans ce sens.
Une autre possibilité est celle d’utiliser les parkings existants sous les immeubles de bureaux, vides le soir et les WE, voire sous les immeubles de logement y compris de la Régie foncière. Une entreprise existe à Paris, qui propose une application pour partager des places de stationnement « privées », elle s’appelle Zen parking. Une entreprise bruxelloise BePark (l’Echo 26/03/2015) propose elle aussi un système de parkings partagés.
Ces solutions répondent à la demande de compensation de la diminution des places de parking en surface, sans hypothéquer, l’avenir et sans détruire les belles places bruxelloises menacées par ces projets.
4. La gratuité, les parkings, ainsi que le réaménagement de surface ne coûteraient « rien au pouvoir public » (argument connu cfr le nouveau stade national) et une tarification favorable serait exigée pour un certain nombre de places destinées aux riverains.
Fort à la mode et fort trompeur aussi l’argument « cela ne coûtera rien au pouvoir public » s’avère le plus souvent un leurre et le récent exemple du stade national nous est revenu en pleine figure. Il n’y a pas de miracle, la privatisation des travaux a un coût et le secteur privé entend tirer un bénéfice lorsqu’il investit.
Dans les appels à marché pour les parkings adoptés le 1er décembre 2014,majorité contre opposition, par le conseil communal, il est prévu que pour la Place Rouppe, la Place du Nouveau Marché aux Grains, la « place de l’Yser (allant du Quai des Commerçants au Quai du Bois à Brûler) et les Brigittines, les entreprises conçoivent, construisent et exploitent les parkings. Le réaménagement de la surface étant à leur frais aussi et avec obligation de maintenir les arbres existants. Il est prévu également qu’un certain nombre de places soient réservées aux habitants pour un montant maximum de 50 euros par mois (600 euros par an, à titre de comparaison une carte riverain coûte 10 euros par an).
La Ville a reçu des offres pour 3 de ces 4 parkings, ainsi que pour l’extension du parking Poelart, que je ne traite pas ici. L’ensemble des candidatures a été sélectionné le 11 juin par le Collège et les candidats invités à remettre offre . Parmi ces candidats on retrouve sans surprise tout le monde de la construction et du parking associés ou non. L’avenir nous dira s’ils sont vraiment intéressés dans le respect des conditions émises par la Ville et quelles seront les contreparties demandées.
En guise de conclusion, temporaire.
A l’examen des données il n’est pas correct d’annoncer que le coeur de Bruxelles, l’hyper centre, a aujourd’hui besoin de nouveaux parkings. Ceux qui existent sont sous occupés. Des solutions alternatives existent: meilleure signalisation, meilleure tarifications, nouvelles applications pour l’utilisation des parkings sous les immeubles de bureaux. Les appels à la construction de nouveaux parkings ainsi qu’une signalisation catastrophique sur la petite ceinture, risquent de renforcer l’idée d’un centre ville inaccessible faisant encore fuir des visiteurs attendus alors que la Ville se veut accueillante. Il est urgent de changer cet état des choses.
Les entreprises du secteur de la construction et des parkings ont répondu aux appels d’offre pour les nouveaux parkings, c’est dire la rentabilité du secteur qui même avec des parkings sous occupés crée un engoument.4 belles places bruxelloises sont mises en danger par le Collège de la Ville, non pas au nom de la mobilité mais au service de puissants intérêts économiques. Au détriment même de l’attractivité de la Ville?
Henry Ernest
Il y a une chose contre les parkings que la ville souhaite créer : rien n’est pour palier à l’engorgement des voiries de la ville à toute heure de la journée : c’est empêcher les voitures venant de l’extérieur de la région Bruxelloise qu’il faut faire et pas offrir de nouvelles possibilités de stationnement. Les places ainsi créées devraient dans tous les parkings être gratuites pour les habitants à proximité des parkings tant nouveaux qu’anciens. Dissuader les non résidents des 19 communes en créant un pass de une heure gratuit pour les habitants de Bruxelles et obliger aux autres de payer l’accès aux tunnels dont l’entretien devient particulièrement onéreux. Des parkings de dissuasion existe qu’ il soit intéressant d’y laisser son véhicule contre une faible redevance et prendre les transports en commun pour se rendre à son travail et en revenir.
Ce que j’en dis n’est pas fondé sur des chiffres mais la ville devient de plus en plus un lieu une zone ou il est impossible de vaquer correctement à ses occupations professionnelles.