Le dossier du stade a fait couler beaucoup d’encre et reste un dossier problématique pour les majorités communale et régionale de Bruxelles. Porté prioritairement par l’Échevin des Sports de la Ville, député régional et sénateur, Alain Courtois, il est en quelque sorte son trophée. A l’examen de ce dossier la question que je me pose régulièrement est celle de savoir comment les bruxellois peuvent être dupés à ce point lorsqu’il s’agit de football et d’immobilier (du gros).
Le Soir de ce 27 novembre reprenait un communiqué de presse de l’Échevin MR qui comportait de toute évidence plus que des inexactitudes sur le financement du gigantesque stade sur le Parking C , au Heysel, propriété de la Ville de Bruxelles mais situé sur le territoire de Grimbergen en Région flamande. Je reprends quelques unes des affirmations trouvées dans l’article.
« Le site n’est pas vendu pour un euro symbolique au développeur »
La décision du Collège de la Ville de Bruxelles de lancer un marché pour la construction et l’exploitation d’un nouveau stade sur le parking C a été prise le 31 mars 2014. Au point 7 a de l’arrêté du Collège, il est indiqué que le droit d’emphytéose ne pourra être attribué qu’aux conditions suivantes :
« le prix (canon) du droit d’emphytéose constituera un critère d’attribution et sera de cette manière déterminé par l’offre économiquement la plus avantageuse en tenant compte de l’estimation préalable, conforme au marché de la valeur du droit emphytéotique à accorder. Le droit d’emphytéose ne sera pas accordé gratuitement. »
Comme le choix est fait de conclure un bail emphytéotique, le site n’est pas vendu, le site est mis à disposition du développeur, BAM Ghelamco. Pendant la durée d’une emphytéose les droits des propriétaires sont limités et en contre partie celui-ci reçoit une redevance annuelle appelé « canon ». Au terme du contrat le propriétaire récupère la pleine propriété de son bien.
Le bail entre la Ville de Bruxelles et Ghelamco prévoit en son article 5 un canon d’1 euro annuel.
Il n’y a pas eu pour le parking C d’estimation préalable par le comité d’acquisition de la valeur du terrain. Il est évident que cette valeur est « élevée », le choix de ne pas demander de canon, en contradiction avec l’appel à marché, peut être vu comme une aide publique en nature pour réduire les coûts du développeur retenu.
« A l’issue de cette échéance, le terrain et les constructions réalisées reviendront de plein droit à la Ville de Bruxelles »
La durée du bail emphytéotique pour le stade étant fixée à 99 ans, le terrain reviendra effectivement de plein droit à la Ville. Quand au stade, le même bail prévoit dans son point E, que la Ville devra racheter les infrastructures construites, « à leur valeur du marché après due expertise et une décote de 20% ». En clair, nos enfants et petits enfants devront racheter le stade qui selon les déclarations d’Alain Courtois « ne devait pas coûter un euro public ».
La Ville devra également racheter le stade en cas de rupture anticipée et de non respect des engagements par l’emphytéote, par exemple en cas de manque d’une équipe de foot à domicile (Point 19.3 du contrat).
Entretemps la Ville interviendra pour plus de 4,1 million d’euros annuels pendant 30 ans, soit un montant de plus de 123 millions d’euros en « contre partie » de places mises à sa disposition.
Ghelamco n’a pas été seulement autorisé à construire le stade sur un terrain pour l’euro symbolique, il est également autorisé à construire un « Campus » immeuble de 5 étages, destiné à un centre de revalidation, un « Center for active life », activités de soins et 2 étages consacrés à des « chambres pour touristes » ( Extrait du MER, rapport d’incidence déposé pour ce projet).
« Ghelamco s’engage à construire un parking de 10.000 places ».
Effectivement le bail prévoit que les 10.000 places de parking actuelles du Parking C se retrouvent dans le projet. Elles seront construites en sous-sol et elles seront payées à hauteur de 80 millions d’euros par la Ville de Bruxelles et par la Région bruxelloise, via la société NEO ! Une société a été constituée à cet effet et Ghelamco , AG Real Estate et Patronale Life participent à hauteur de 50% des parts de la société pour le financement de ce parking.
La Cour des Comptes pourrait utilement se pencher sur ce dossier de stade pour vérifier la bonne affectation des ressources et les engagements pour les générations futures qui sont pris par la majorité politique aujourd’hui.